Ordonnance de non-conciliation (Cass. 1re civ., 14 avr. 2010, n° 09-12.225, inédit)

Publié le par JP

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

 

Attendu qu'une ordonnance de non-conciliation du 3 juillet 2007 a condamné M. X... à payer à Mme X... une pension alimentaire d'un montant mensuel de 4 159,53 euros au titre du devoir de secours ; qu'il était précisé dans ses motifs que les époux s'étaient mis d'accord pour une prise en charge par M. X... de l'emprunt bancaire souscrit pour l'acquisition de la maison résidentielle de Mme X..., le montant de l'échéance mensuelle devant être versé à cette dernière en complément de la pension alimentaire, à charge pour elle d'acquitter directement ce crédit sans récompense lors des opérations de liquidation de communauté, et qu'il y avait lieu de fixer la pension alimentaire à la somme de 3050 euros, à laquelle M. X... ajoutera en complément 1 109,53 euros pour le règlement du crédit immobilier, soit un total de 4 159,53 euros au titre du devoir de secours ; que M. X..., qui avait continué à payer les échéances du prêt à la banque, ne lui versant mensuellement que la somme de 3 050 euros, Mme X..., agissant sur le fondement de l'ordonnance de non conciliation, a mis en oeuvre le 27 novembre 2007 une procédure de paiement direct à son encontre ; que celui-ci en a demandé la mainlevée ;

 

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

 

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

 

Mais sur le deuxième moyen, pris en sa deuxième branche :

 

Vu l'article 1er de la loi n° 73-5 du 2 janvier 1973, ensemble l'article 1351 du code civil ;

 

Attendu que pour ordonner la mainlevée de la procédure de paiement direct, l'arrêt attaqué, après avoir rappelé la teneur des motifs et du dispositif de l'ordonnance de non conciliation, retient que Mme X... ne justifie pas avoir fait depuis juillet 2007 une quelconque démarche en vue d'assumer le paiement du prêt immobilier en cause, que la banque, qui confirme l'absence de toute demande à cette fin, note que le financement ne peut faire l'objet de modification même mineure sans l'accord des co-emprunteurs ; que le prêt a continué à être payé par le mari sans que l'épouse justifie d'une quelconque opposition, que M. X... établit avoir régulièrement versé, outre les mensualités en cause, le paiement de la pension alimentaire ;

 

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que M. X..., qui n'invoquait aucun événement de force majeure de nature à l'exonérer de ses obligations, n'avait payé que partiellement à Mme X... l'échéance de la pension alimentaire telle qu'elle avait été fixée par l'ordonnance de non conciliation, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

 

Et sur le quatrième moyen, pris en ses trois branches réunies :

 

Vu l'article 6 du décret n° 73-216 du 1er mars 1973 ;

 

Attendu que pour condamner Mme X... au paiement d'une amende civile, l'arrêt retient, par motifs tant propres qu'adoptés, que Mme X... a volontairement trompé la religion de l'huissier de justice et tenté de tromper la religion du tribunal en produisant des documents tronqués ou parcellaires, en l'occurrence le dispositif de l'ordonnance sans les motifs et des relevés de compte incomplets ; qu'il résulte des conclusions de la défenderesse que cette manoeuvre avait pour but d'infirmer dans les faits les dispositions de l'ordonnance de non-conciliation pour établir une situation fiscale ou patrimoniale plus favorable ; que la procédure diligentée est particulièrement abusive ;

 

Qu'en statuant ainsi, alors que le dispositif de l'ordonnance de non-conciliation ne contredisait en rien ses motifs et que Mme X... pouvait légitimement se prévaloir de la non exécution de ce dispositif, seul revêtu de l'autorité de la chose jugée, pour diligenter la procédure de paiement direct à l'encontre de M. X..., la cour d'appel, en statuant par des motifs impropres à caractériser l'abus retenu à l'encontre de Mme X..., a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

 

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les première et troisième branches du deuxième moyen et sur le troisième moyen :

 

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a ordonné la mainlevée de la procédure de paiement direct diligentée le 27 novembre 2007 par Mme X... à l'encontre de M. X... et condamné Mme X... au paiement d'une amende civile de 200 euros, l'arrêt rendu le 5 février 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen, autrement composée ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze avril deux mille dix.

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